PATIENCE DE DIEU
- Bible en main
- 27 sept.
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Il a toujours été difficile pour l’homme de comprendre la grâce et la patience de Dieu, notamment sa dimension universelle, qui la met à la portée de tous, même de ceux chez qui pourtant se trouvent tous les ingrédients du mal. Paul, à qui Dieu a donné de le comprendre, l’évoque à plusieurs reprises qualifiant même de mystère ce salut offert par grâce, qui que l’on soit. Un mystère qui cependant devient réalité pour tous que par Dieu lui-même, par Jésus-Christ : « Dieu a voulu faire connaître quelle est la glorieuse richesse de ce mystère parmi les païens savoir : Christ en vous, l’espérance de sa gloire » Colossiens 1 :27
Ainsi, même ceux qui sont et font le contraire de Dieu, peuvent en se laissant transformer par Dieu lui-même, devenir « cohéritiers, former un même corps et participer à la même promesse en la bonne nouvelle de Jésus-Christ » Ephésiens 3 :6
Bien longtemps avant Paul, un autre personnages avait eu du mal à comprendre cela ; c’est Jonas. Qui ne connais pas cette histoire ? Appelé par Dieu pour aller prévenir Ninive, la grande ville, pour qu’elle se repente, qu’elle abandonne les maux qui la rongent, ses mœurs débridés et sa méchanceté, sans quoi sa fin est proche, par sa destruction sous quarante jours. On connait la réponse de Jonas à cet appel, il s’enfuit. Il ne veut pas aller dans cette ville de perdition qui sait mater celles et ceux qui parlent contre elle. Comment imaginer d’ailleurs qu’elle puisse se repentir ? comment imaginer qu’elle puisse être éligible au salut ? Jonas connait très bien Ninive et les Assyriens, leur méchanceté, leur suffisance, où seuls leurs intérêts comptent et il a raison d’en avoir peur. Dès lors comment imaginer que Dieu puisse faire grâce à la ville de Ninive ?
Et Jonas connaît aussi le Dieu de la Bible, ce qu’il est au plus profond de lui et comment il peut être bon : « Je sais que tu es un Dieu compatissant et miséricordieux, lent à la colère et riche en bonté et qui se repens du mal » Jonas 4 :2 Alors à quoi bon aller s’exposer à Ninive !
Jonas avait raison quant à la bonté de Dieu, car à la faveur d’un bel arbre qui s’est desséché en une nuit, Dieu lui dit : « tu as pitié ce cet arbre qui ne t’a rien coûté, et moi je n’aurai pas pitié de Ninive, la grande ville dans laquelle se trouve 120 000 hommes qui ne savent pas distinguer leur droite de leur gauche ! » Jonas 4 :1
Ninive (aujourd’hui Mossoul en Irak), ce n’est pas rien, c’est la capitale du premier grand empire terrestre l’Assyrie. Elle fut fondée par quelqu’un qui a aussi fait parler de lui, il s’agit de Nimrod. C’est une très grande ville : il faut trois jours de marche pour la traverser (Jonas 3 :3). C’est l’une des villes les plus puissantes et les plus riches du monde antique. C’est aussi une capitale religieuse centrale avec le culte à la déesse Ishtar. Ninive signifie « la maison de la déesse » ou « des dieux ». Elle est concurrente de Babylone, une concurrence d’ailleurs qui se transformera en conflit qui tournera en défaveur de Ninive et de l’Assyrie.
Jonas sur l’insistance de Dieu finalement s’y rendra et contre toute attente les ninivites et leurs dirigeants vont entendre l’appel de Dieu et vont se repentir :
« Les gens de Ninive crurent à Dieu, ils publièrent un jeûne, et se revêtirent de sacs, depuis les plus grands jusqu'aux plus petits. Par ordre du roi et de ses grands : Que les hommes et les bêtes soient couverts de sacs, qu'ils crient à Dieu avec force, et qu'ils reviennent tous de leur mauvaise voie et des actes de violence dont leurs mains sont coupables.
Dieu vit qu'ils agissaient ainsi et qu'ils revenaient de leur mauvaise voie. Alors Dieu se repentit du mal qu'il avait résolu de leur faire. » Jonas 3 :5-10
Cela illustre parfaitement ce que Paul disait aux chrétiens d’Ephèse « Car c’est par grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » Ephésiens 2 :10
On pourrait s’en arrêter là, face à ce Dieu qui accueille, qui que l’on soit et quelle qu’a été notre histoire, un Dieu qui ne limite pas sa bonté pour sauver, offrant son salut à toutes et tous.
Il y a beaucoup d’autres exemples dans la Bible où la bonté de Dieu dépasse ce que peuvent concevoir les hommes. Un texte évoque comment le jugement de Dieu s’exerce, dans une dimension qui n’est pas celle de l’homme.
1 Samuel 16:7 : « L’Éternel ne considère pas ce que l’homme considère; l’homme regarde à ce qui frappe les yeux, mais l’Éternel regarde au cœur. »
Ainsi les gens de Ninive et leurs dirigeants crurent à Dieu et se convertirent. Mais dans les années qui vont suivre entre -800 et -615, Ninive et plus largement les Assyriens vont se présenter sous un tout autre visage, oubliant ce que Dieu fit pour eux, en devenant les acteurs centraux de l’histoire, opérant de nombreuses conquêtes, en assujettissant les peuples, dont le peuple de Dieu, en s’’enrichissant en usant de tous les moyens, même des plus durs, pour arriver à leurs fins.
Jusqu’à ce que paraissent 3 prophètes : Nahum – Habacuc – Sophonie. Quant Habacuc s’émeut du peuple de Dieu qui par peur ou intérêt, s’est laissé entrainer par la puissance Assyrienne, Nahum et Sophonie, de la part de Dieu, discourent eux contre l’Assyrie et Ninive avec des propos qui sont sans aucune commune mesure avec ceux tenus par Dieu lui-même du temps de Jonas. C’est pourtant bien de la part de Dieu qu’ils parlent. Dieu aurait-il deux discours ? La grâce de Dieu serait-elle arrivée à son terme ?
On sait peu de chose sur le prophète Nahum, comme si l’urgence pour lui n’était pas dans les civilités mais dans le message qu’il avait à délivrer contre la grande ville Ninive et cette fois non pour porter un appel à se repentir et à revenir à Dieu, comme Jonas, mais pour dire que s’en est fini. C’est le seul prophète de la Bible qui termine son propos par un jugement ferme et définitif. La datation de Nahum n’est pas certaine, peut-être a-t-il écrit au temps du roi Manassé, lequel s’est soumis au roi Assyrien ou peut-être s’est-il exprimé après le règne d’Ezéchias, un roi qui a dû affronter les assauts, l’oppression, les menaces et le harcèlement des Assyriens, qui ont même défié Dieu. On trouve cela rapporté dans 2 Rois 18. Le chef de l’armée assyrienne lui dit « Ainsi parle le grand roi d’Assyrie, quelle est cette confiance sur laquelle tu t’appuies ? Peut-être direz-vous : c’est en l’Eternel notre Dieu… Les dieux des nations ont-ils délivré chacun son pays de la main du roi d’Assyrie, pour que l’Eternel délivre Jérusalem de ma main ? » Ce texte illustre parfaitement ce qu’était Ninive et l’Assyrie, plein d’orgueil, de suffisance, de certitude.
Le peuple de Dieu dans l’Ancien Testament a été confronté à trois grandes puissances dont d’ailleurs il ne reste presque rien aujourd’hui, et qui doivent faire réfléchir le monde moderne, face à Dieu.
La première de ces puissances est l’Egypte avec un Pharaon qui se veut être l’égal de Dieu, réussissant même dans une certaine mesure à imiter les prodiges du Dieu vrai, créateur du ciel et de la terre, alors qu’il s’oppose à Moïse. Finalement Pharaon sera vaincu et Dieu délivrera son peuple de l’emprise de Pharaon, lui ouvrant une porte vers une destinée nouvelle.
Puis il y eu Ninive, capitale de l’Assyrie, fière de sa puissance, orgueilleuse de ses succès, préoccupée que d’elle-même, usant des pires violences pour arriver à ses fins. Nahum dit d’elle « Ninive était jadis comme un réservoir plein d'eau… On pille, on dévaste, on ravage! Et les coeurs sont abattus, Les genoux chancellent, Tous les reins souffrent, Tous les visages pâlissent… Le lion déchirait pour ses petits, Étranglait pour ses lionnes; Il remplissait de proie ses antres, De dépouilles ses repaires. » Nahum 2
Quant à Sophonie il évoque aussi le grand estime que Ninive avait d’elle-même « Voilà donc cette ville joyeuse, Qui s'assied avec assurance, Et qui dit en son cœur : Moi, et rien que moi! » Sophonie 2 :15
Enfin il y a eu Babylone, le vainqueur de Ninive (entre -620 et -609) et elle aussi a l’esprit de conquête et œuvre à la négation du Dieu de la Bible. A la différence de Ninive, le roi de Babylone n’use cependant pas de violence mais développe une autre stratégie, celle de l’assimilation sociale et de l’imprégnation culturelle et spirituelle des peuples conquis, laissant en échange, liberté et promesse d’une belle vie. L’expérience rapportée du jeune Daniel et de ses amis l’illustre parfaitement.
Trois dominations qui font face au Dieu des origines. Trois dominations qui présentent des caractéristiques qui étonnement ne sont pas loin d’être aussi celles de notre monde moderne :
- Egypte : se croire comme Dieu,
- Ninive : l’orgueil du « moi et rien que moi »,
- Babylone : promettre mieux, séduire et faire croire en contrefaisant le vrai
Avec un point commun à ces trois dominations : la négation de Dieu et l’objectif de faire oublier le Dieu des origines en le remplaçant, parfois en proposant juste une copie du vrai, où se mêle le faux au vrai. Comme les Assyriens, qui après avoir conquis le royaume d’Israël, remplacèrent la population en demandant à ce que soit toutefois conserver les us et coutumes du Dieu des Hébreux. Plus tard ce peuple d’émigration, qui mêlait au culte à Dieu d’autres rites et d’autres divinités, constitue les Samaritains (gens de Samarie), lesquels seront haïes par les Juifs du temps de Jésus. Jésus n’a pas rejeté les Samaritains et à la Samaritaine il dira « Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: Donne-moi à boire! tu lui aurais toi-même demandé à boire, et il t'aurait donné de l'eau vive. » Jean 4 :10
Alors que Nahum commence son message en exposant la colère de Dieu (v2) face à celle et ceux qui le rejettent, il dit (v3) que ce n’est toutefois pas la nature de Dieu. Bien au contraire, Dieu est « lent à la colère et il est grand », ajoutant au verset 7 « L’Eternel est bon, il est un refuge au jour de la détresse, il connaît ceux qui se confient en lui »
Cela fait raisonner ce que l’apôtre Pierre dira des siècles plus tard « Le Seigneur ne tarde pas dans l'accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le croient; mais il use de patience envers vous, ne voulant pas qu'aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance. » 2 Pierre 3 :9
Oui le Dieu de la Bible est patient, il attend parce qu’il veut le salut de tous. C’est ce que Dieu voulait pour Ninive, ce que Jonas ne comprenait pas. Mais ce que Dieu révèle par Nahum, c’est que sa patience a cependant une limite. Une limite qui ne vient pas de Dieu mais de l’homme lui-même. La limite de la patience de Dieu c’est quand l’homme ferme définitivement la porte à Dieu. Quand Dieu n’est plus un recours, ni même une option. Paul d’ailleurs développera cela dans sa lettre aux Romains « puisque ayant connu Dieu ils ne l’ont pas glorifié comme Dieu et ne lui ont pas rendu grâce ; mais ils se sont égarés dans leurs pensées et leur cœur sans intelligence a été plongés dans les ténèbres » Romains 1 :21 Et Paul reprendra cette phrase de Nahum « Se vantant d’être sages ils sont devenus fous »
Ninive qui s’était saisie de la grâce de Dieu au temps de Jonas, a tourné le dos à Dieu préférant s’appuyer sur ses propres potentiels.
Ce que l’expérience de Jonas et le message de Nahum nous disent c’est que la grâce de Dieu est pour tout le monde, même pour le pire des hommes, dès lors cependant qu’il accepte de faire sienne cette grâce. C’est ce que Dieu veut : que tous les hommes parviennent à la repentance. Et Dieu déploie tous les moyens pour se révéler à tous les hommes, d’une manière ou d’une autre :
Dieu le dira d’ailleurs à Job 33 :14 « Dieu parle cependant, tantôt d'une manière, Tantôt d'une autre, et l'on n'y prend point garde. »
Paul aussi le dira aussi dans Romains 1 :19 « car ce qu’on peut connaître de Dieu est manifeste pour eux, Dieu le leur ayant fait connaître. En effet, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’oeil, depuis la création du monde, quand on les considère dans ses ouvrages. ». Le Dieu de la Bible est un Dieu qui se révèle et qui s’offre à tous, même à ceux qui à vue d’homme n’en sont pas dignes. Encore faut-il l’accepter. Dès lors Paul rajoutera « ils sont inexcusables »
Le dernier message de Dieu qu’il confie à l’apôtre Jean et qui renvoie à un temps où la question de croire où pas en Dieu se pose, raisonne aussi comme celui que Jonas était chargé de porter à Ninive. « Je vis un autre ange qui volait par le milieu du ciel, ayant un Evangile éternel, pour l'annoncer aux habitants de la terre, à toute nation, à toute tribu, à toute langue, et à tout peuple. Il disait d'une voix forte: Craignez Dieu, et donnez-lui gloire, car l'heure de son jugement est venue; et adorez celui qui a fait le ciel, et la terre, et la mer, et les sources d'eaux » Apocalypse 14 :6-7
Un puissant appel lancer à toute la terre, à toute nation, à toute tribu, comme celui de Jonas qu’il devait porter par toute la ville et tous ses habitants.
Si la repentance des ninivites leur ouvrit la grâce de Dieu, encore fallait-il que cela soit sincère et que cela soit un véritable choix de venir ou revenir à Dieu, comme un choix vie et non la réaction à l’émotion d’un moment ; car celle-ci passée, tout reprend comme avant.
Le court message de Nahum est le seul de toute la Bible qui se termine par un jugement définitif, sans appel pour Ninive, mais avec une bonne nouvelle pour celles et ceux qui font le choix de Dieu : «Voici sur les montagnes les pieds du messager qui annonce la paix. Célèbre tes fêtes, Juda, accomplis tes voeux, car le méchant ne passera plus au milieu de toi. Oui, l'Eternel rétablit la gloire de Jacob et la gloire d'Israël » Nahum 2 :1-3
Tout comme le dernier message de Dieu aux hommes dans Apocalypse 14. Il y a ceux qui font le choix de Dieu et qui font leur la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ, et les autres dont le choix ferme la porte à Dieu et conduit à un jugement définitif.
Mais une chose est sûre, c’est que ce n’est pas une fatalité. Dieu veut depuis la nuit des temps que tous les hommes fassent le bon choix. Déjà par Moïse Dieu appelait à ce bon choix « J'en prends aujourd'hui à témoin contre vous le ciel et la terre: j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie afin de vivre, toi et ta descendance, en aimant l'Eternel, ton Dieu, en lui obéissant et en t'attachant à lui. Oui, c'est de lui que dépendent ta vie et sa durée, » Deutéronome 30 :19
Et comme l’apôtre Pierre le dit « il use de patience envers tous afin que tous arrivent à la repentance »
La grâce de Dieu est pour tous, quelle que soit son histoire et son parcours de vie, à chacune et chacun de s’en saisir par Jésus-Christ, car : « Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. » Romain 6 :4
Quoi que soit notre situation Dieu veut le meilleur pour l’homme, mais il ne peut rien envers celui qui le rejette. Par contre il peut tout pour celui qui le choisi et décide de mettre chaque jour ses pas dans les siens, en se laissant transformer par lui.



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