L'Eglise en Dieu et en Jésus-Christ
- Bible en main
- il y a 6 jours
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Lorsque Paul parle de l’Eglise aux communautés naissantes de la chrétienté, quand il les salue aussi, il emploi dans toutes ses épîtres le vocable : « à l’Eglise de Dieu qui est à … » ou « … l’Eglise du Seigneur… ».
Sauf dans ses lettres aux Thessaloniciens, où Paul salue ces Chrétiens en disant « … à l’Eglise des Thessaloniciens… ».
Lorsque l’on étudie ces deux épîtres, notamment la première, on s’aperçoit vite que ce n’est pas de la part de Paul un effet de style singulier, mais une marque de reconnaissance qu’il n’a pas lorsque qu’il s’adresse aux autres communautés. En effet, de manière invariable Paul présente toujours l’Eglise comme étant celle de Dieu et non celle des hommes. Qu’y-a-t-il donc à comprendre ?
Les lettres de Paul aux Thessaloniciens sont ses premières lettres écrites au début des années 50, alors qu’il est à Corinthe au cours de son second voyage. Son séjour à Thessalonique ne fut pas très long, 3 semaines environ, après son passage à Philipi. Une période difficile pour Paul qui connaîtra sa première plus grande opposition. Son séjour et les évènements qui s’y sont produits, sont décrits dans Actes 17. Comme à son habitude c’est d’abord vers la synagogue qu’il se rend. Mais au sein même de ceux qui pourtant sont la descendance biblique, il ne convainc pas, exceptés quelques-uns. Toutefois il trouve une meilleure audience auprès de non Juifs, « d’une grande multitude de Grecs et beaucoup de femmes de qualité » Actes 17 :1-4
Par une manœuvre d’influence, les Juifs vont faire accuser Paul d’être à l’origine d’un mouvement social, ce qui va à l’encontre des lois romaines. Et non seulement cela, mais il va aussi être accusé de porter atteinte à l’Empereur, ce qui à l’époque valait la mort. Un comble lorsque l’on sait que les Juifs se sont toujours opposés à la domination romaine.
Paul devra s’enfuir de nuit et il se rendra à Bérée (à environ 80 km de là - aujourd’hui la ville de Véria). Mais les Juifs de Thessalonique le poursuivront jusque là-bas et il devra à nouveau partir pour se rendre à Athènes. Il laissera toutefois à Bérée ses compagnons de route Silas et le jeune Timothée.
Ce qui reste de Paul à Thessalonique c’est donc une jeune Eglise chrétienne principalement constituée de non juifs. Des chrétiens jeunes dans la foi, mais pleins d’enthousiasme, très engagés et fermes devant l’opposition dont ils font l’objet. D’ailleurs Paul dira d’eux «… nous rendons continuellement grâce à Dieu de ce qu’en recevant la parole de de Dieu, vous l’avez reçue non comme la parole des hommes, mais, ainsi qu’elle l’est véritablement, comme la parole de Dieu qui agit en vous qui croyez. » 2 Thessaloniciens 13
Dès le premier verset de sa première lettre, Paul salue les Thessaloniciens d’une manière que l’on ne trouve dans aucune autre de ses épîtres : « A l’Eglise des Thessaloniciens qui est en Dieu le Père et en Jésus-Christ le Seigneur ».
En premier lieu on notera que Paul ne parle pas au pluriel, comme pour parler de chacun individuellement comme il le fait dans ses autres épîtres, mais au singulier. C’est l’Eglise toute entière qui est en Dieu, reconnaissant ainsi que cette communauté, quoique naissante et jeune dans la foi avait réussi à faire Eglise et même à être le type de l’Eglise de Dieu. Comme cette église d’actes 2 « Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans la prière ». En effet ce n’est pas parce que l’on « va » à l’église que l’on est de l’Eglise de Dieu, mais c’est parce que l’on « fait » Eglise et que l’on « est » l’Eglise. Il y a un « ensemble » nécessaire. D’ailleurs à la toute fin, l’apôtre Jean dans Apocalypse 22 lorsqu’il est question du rétablissement de toute choses ou le mal ne sera plus, il ne dit pas : les chrétiens disent viens. Il dit « l’Esprit et l’épouse,( c’est-à-dire l’Eglise), disent vient » Apocalypse 22 :17.
La communauté de Thessalonique faisait corps, comme celui que décrit Paul dans sa lettre aux Ephésiens (chapitres 3 et 4), d’ailleurs Paul le dira clairement « Pour ce qui est de l’amour fraternel, vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive, car vous avez-vous-même appris de Dieu à vous aimer les uns les autres » 1 Tess 4 :9
Mais cette communauté de Thessalonique, n’est pas non plus qu’une église parmi d’autres. Elle est particulière, même singulière. Paul dit qu’elle « est en Dieu et en Jésus-Christ le Seigneur » (v1)
Il n’y a que cette communauté-là qui est présentée comme « une Eglise en Dieu le Père ». On voit ici la recherche d’une relation étroite avec Dieu comme la raison d’être de cette église et qui vit cette relation privilégiée. C’est aussi constater que cette communauté connait Dieu, d’une part comme l’unique Dieu souverain, tout-puissant et créateur de toute chose, mais aussi, d’autre part, comme un Dieu présent comme un père, et de là elle se reconnait comme de ses enfants, dépendants de lui. Pour ces chrétiens de Thessalonique éduqués dans le paganisme grecs et dans les « sagesses » philosophiques, cela montre la profondeur de leur conversion, que Paul saluera « … vous vous êtes convertis à Dieu en abandonnant vos idoles pour servir le Dieu vivant et vrai » 1 Tess 1 :9
De là des questions raisonnent pour nous :
- Quel dieu est notre Dieu ?
- Comment connaissons-nous ou reconnaissons Dieu ?
- Nous reconnaissons-nous comme enfant de Dieu, donc dépendant de lui ?
- Sommes-nous « convertis à Dieu » ? tournant le dos, comme les Thessaloniciens, à nos autres dieux.
Mais ce n’est pas tout, ce que cette Eglise de Thessalonique avait aussi compris, c’est que la nature pécheresse de l’homme qui mène toujours au mal, nous éloigne de ce Dieu Père. C’est pourquoi cette communauté n’est pas seulement « en Dieu », elle est aussi « en Jésus-Christ le Seigneur ».
Ils reconnaissaient que le seul chemin qui conduit à Dieu, c’est celui qui passe par Jésus. Ce que Paul dira plus tard aux Corinthiens « Si quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. Et tout cela vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par Christ, et qui nous a donné le ministère de la réconciliation. Car Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n'imputant point aux hommes leurs offenses, et il a mis en nous la parole de la réconciliation.… » 1 Corinthiens 5 :17-19
En second lieu, ces chrétiens ne font pas route en solitaires, c’est une Eglise qui fait Eglise avec cette vision commune et cette quête commune de tisser une relation toujours plus étroite avec Dieu le Père par Jésus-Christ qui par sa victoire sur le péché est à même d’être comme une passerelle qui conduit l’homme à Dieu. « Mais lui, parce qu'il demeure éternellement, possède un sacerdoce qui n'est pas transmissible. C'est aussi pour cela qu'il peut sauver parfaitement ceux qui s'approchent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour intercéder en leur faveur. » Hébreux 7 :24-25
Tout cela, chez les chrétiens de Thessalonique, ce n’était pas que des mots ou des intentions, mais cela imprégnait leur vie de tous les jours que Paul synthétise au verset 3 « nous rappelant sans cesse l'oeuvre de votre foi, le travail de votre charité, et la fermeté de votre espérance en notre Seigneur Jésus Christ, devant Dieu notre Père. »
Une déclaration pleine de sens qui se traduit en action : une foi qui se voit, un amour qui se vit au quotidien, une espérance qui est conviction qui s’affirme. Pour Paul, c’est aussi la marque de l’attachement de cette communauté à se laisser guider par l’Esprit, car tout cela ne relève pas de la nature de l’homme, mais est le fruit de la puissance du Saint-Esprit, qui transforme.
Paul, certainement en se servant de l’exemple donné par cette Eglise de Thessalonique, reprendra ce triptyque (la foi, l’espérance et l’amour) plus tard dans sa lettre aux corinthiens (1 Cor 13). Mais là, non pas pour saluer des qualités de vie des corinthiens mais pour appeler les chrétiens de Corinthe à inscrire la foi, l’espérance et l’amour comme la base de la vie du chrétien.
Et pour nous :
- Qu’en est-il de notre foi ? Ce que l’expérience des Thessaloniciens nous dit, c’est que l’on ne peut pas être croyant sans être pratiquant.
- Qu’en est-il de notre relation à l’autre ? est-elle animée par l’amour ?
- Qu’en est-il de notre espérance ? Est-elle réalité en nous et de là est-ce qu’elle est solide et est-elle « une ancre de l’âme » ? comme le dit Hébreux 6 :19
- Sommes-nous dans une marche solitaire ou faisons-nous Eglise avec une même vision, des mêmes objectifs ?
Paul retrouvera ces valeurs de vie dans la communauté d’Ephèse (voir Ephèse 1), toutefois à l’épreuve du temps, Dieu révèle à Jean que la foi, l’espérance et l’amour de l’Eglise d’Ephèse, ne sont plus ce qu’elles étaient et Dieu questionne leur pratique (Apocalypse 2 :1-4).
La communauté de Thessalonique n’était pas dans une pratique ritualisée, convenue par les habitudes ou la bienséance. Elle vivait réellement la foi, l’espérance et l’amour et chaque membre était porté par cette volonté commune d’être toujours plus proche de Dieu le Père. D’ailleurs le verset 10 donne ce qui animait leur vie : «… comment vous vous êtes convertis à Dieu, en abandonnant les idoles pour servir le Dieu vivant et vrai, ET pour attendre des cieux, son fils, qu’il a ressuscité des morts, Jésus, qui nous délivre de la colère à venir » 1 Tess 10
Ce qui porte cette communauté et qui donne sens à leur engagement et à leur foi aussi, c’est cette attente impatiente du retour de Jésus et la réalisation de sa promesse faite en Jean 14.
Pour eux ce n’est pas un concept ou quelque chose pour plus tard, mais une réalité, un bientôt. Le chapitre 5 :1-5 expose cette certitude des chrétiens de Thessalonique du proche retour de Jésus-Christ et Paul devra les rassurer pour ce qui concerne ceux qui décèdent.
Paul reconnaitra les chrétiens de Thessalonique comme « des enfants de la lumière et des enfants du jour » (5 :5) et de leur vie de chrétiens Paul tirera pour tous, pour lui aussi, des leçons de vie chrétienne (chapitre 5) :
- « Ne dormons point comme les autres, mais veillons et soyons sobres »
- « Dieu ne nous a pas destinés à la colère, mais à l’acquisition du salut par notre Seigneur Jésus-Christ »
- « Exhortez-vous réciproquement et édifiez-vous les uns les autres »
- « Avertissez ceux qui vivent dans le désordre, consolez ceux qui sont abattus, supportez les faibles, usez de patience »
- « Soyez toujours joyeux »
- « Priez sans cesse »
- « Rendez grâce à Dieu en toute chose »
- « N’éteignez pas l’Esprit »
- « Ne méprisez pas les prophètes »
Lorsque l’on sait que la lettre aux Thessaloniciens est la première des lettres de Paul, le vécu de ces chrétiens a marqué Paul lui-même et cela a certainement été pour lui l’exemple de ce que doit être le chrétien, un exemple qu’il a partagé aux autres communautés chrétiennes au travers de ses autres lettres.
Non seulement ces chrétiens de Thessalonique, jeunes dans la foi et bousculés par leur environnement qui leur était hostile, avaient un vécu spirituel qui faisait d’eux l’Eglise de Dieu, ils sont de fait devenus des exemples, à tel point qu’ils étaient pris pour modèles pas seulement en Macédoine mais aussi dans toute la Grèce et leur foi était connue en tout lieu (1 Tess 1 :7-8).
- Quel chrétien sommes-nous ? Sommes-nous exemple pour d’autres ?
- Comment vivons-nous notre chrétienté et est-elle atteinte par l’usure du temps ?
- Est-ce que notre foi est portée par la promesse de Jésus de son prochain retour pour établir un monde nouveau ?
Pour autant, ces chrétiens de Thessalonique n’étaient pas parfaits, mais par leur vie de chrétien, concrète et engagée ils progressaient, ce que Paul reconnait en 2 Thessaloniciens 1 :3-4 « Nous devons à votre sujet, frères, rendre continuellement grâces à Dieu, comme cela est juste, parce que votre foi fait de grands progrès, et que la charité de chacun de vous tous à l'égard des autres augmente de plus en plus. Aussi nous glorifions-nous de vous dans les Églises de Dieu, à cause de votre persévérance et de votre foi au milieu de toutes vos persécutions et des tribulations que vous avez à supporter. »
Lorsque l’on considère ce que veut dire être chrétien pour les Thessaloniciens, comment elle a façonné leur vie de tous les jours et comment leur foi et leur espérance étaient solides, on comprend la salutation de Paul à cette seule Eglise, comme « l’Eglise des Thessaloniciens qui est en Dieu et en Jésus-Christ le Seigneur ».
Ce qu’ont été les Thessaloniciens n’est pas hors de portée. Ils n’ont finalement rien fait d’autre que de vivre en chrétien selon Dieu, portés par leur ferme espérance du proche retour de leur Père et de leur Seigneur Jésus-Christ.
Que leur expérience nous serve à vivre en chrétien, en Dieu et en Jésus-Christ et à être « des enfants de la lumière et des enfants du jour ».



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